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14 juin 2017 | écrit par Philippe-Olivier Jasmin |
Vos soins cervicaux plafonnent? Vos clients se sentent beaucoup mieux dans les jours suivant votre intervention, mais la douleur récidive promptement? Est-ce que la posture de ceux-ci ressemble à celle de M. Burns (ici à droite)? Si vous avez répondu oui à ces trois questions, penchons-nous sur la protraction cervicale.
Cette adaptation posturale se caractérise simplement par un centre de gravité crânien débalancé vers l’avant. Certains auteurs exigent toutefois que les arches zygomatiques se trouvent à une distance minimale devant la fourchette sternale afin de conclure à une protraction cervicale.
Le phénomène débute par un effet domino prenant naissance à C7-D1 où, étage par étage, les vertèbres se laissent tomber en flexion, amenant du même fait le regard vers le plancher des vaches. Puisque le système nerveux préfère que l’on regarde devant soi plutôt que d’avoir le regard rivé au sol, il se réveille au moment où la flexion demande à C3 et à C1 de s’incliner. Prenant conscience de cette chute libre cervicale, il martèle avec insistance le frein. Les extenseurs de la tête s’activent alors en contre-ballant et entraînent une hyperextension occipitoatloïdienne afin de ramener le regard vers l’horizon.
Le phénomène se résume donc en deux mouvements principaux :
Rapports de forces impliqués :
Bien qu’initialement la problématique débute avec une flexion cervicale, un intrus intervient rapidement dans l’équation : la gravité. Nous savons que le cou doit supporter dix livres additionnelles par pouce de translation antérieure du crâne. Plus le glissement antérieur augmentera, plus la tête sera tirée vers le bas par la gravité. Une bataille s’entame alors et un cercle vicieux s’en suit.
L’équilibre du segment cervical est maintenu entre autres par les muscles cervicaux postérieurs profonds. Malheureusement pour eux, ils hériteront de la difficile mission de résister à la force grandissante de la gravité causée par le glissement antérieur. Leur mandat se déroule adéquatement jusqu’à ce qu’ils soient privés d’oxygène. En effet, leurs constantes contractions isométriques contrecarrent leur étirement pendant la protraction cervicale, ce qui conduit à une chute de circulation et, donc, à un appauvrissement en énergie. Exténués et incapables d’accomplir leur mission, ils transfèreront alors le flambeau aux muscles cervicaux superficiels.
Toutefois, avec ses fibres à contractions rapides, la musculature superficielle arbore une personnalité plus dynamique et explosive. Celle-ci capitule rapidement face aux efforts constants et de longue durée nécessaires à cette bataille. Gloutons et plus énergivores que nos muscles profonds aux fibres à contractions lentes, les muscles superficiels épuisent promptement leurs ressources et échouent lamentablement dans leur mission de sauvetage. Le fardeau retourne à nos muscules cervicaux profonds qui présentent déjà un état pitoyable.
Pendant ce temps, la gravité entraîne la tête vers l’avant et le bas. Et plus elle migre, plus elle est lourde… Résultat : votre client se présente dans votre bureau avec le cou coulé dans le béton.
Trois jeux de forces de tension et de compressions assurant la stabilisation et l’équilibre du segment cervical méritent d’être soulignés :
C’est bien beau, mais qu’est-ce que je fais avec ça?
La partie facile : relâcher la musculature concentriquement contractée en ciblant d’abord les fléchisseurs cervicaux pour ensuite tourner notre attention vers les extenseurs de la tête.
Ainsi, l’approche locale visera le relâchement des muscles suivants :
La partie qu’on oublie souvent : activer les fléchisseurs profonds de la tête pour contrecarrer l’hyperextension occipitoatloïdienne. Il conviendra aussi de renforcir les extenseurs cervicaux pour tirer la tête vers l’arrière et favoriser la réapparition d’une lordose cervicale saine.
Cependant, s’obstiner à travailler ces deux derniers groupes de muscles en relâchement est tentant, mais futile. Nous pouvons, certes, viser à estomper leur mauvaise humeur, mais leur hypertonus n’est qu’un symptôme; une adaptation aux tensions présentes chez les extenseurs de la tête et les fléchisseurs cervicaux. Ce serait comme tenter de défoncer un mur avec sa tête; vous pouvez réussir, mais le tout impliquera un bordel et un méchant mal de tête.
En résumé, l’approche locale visera à activer ou renforcir les muscles suivants :
Complications possibles et variables à considérer :
Enfin, souvenez-vous que la posture n’est que le résultat de forces appliquées sur le squelette : un merveilleux mariage entre l’anatomie et la physique! Si une problématique provient de la rencontre entre une prédisposition et un élément déclencheur, la posture appliquera lourdement son poids dans la catégorie des prédispositions. De plus, le corps sacrifiera toujours son mouvement pour stabiliser une instabilité. Avant de travailler à rétablir l’amplitude, assurez-vous de désarmer les mécanismes de défense présents afin de limiter les risques de fragilisation et de récidive.
Bons soins!
Philippe-Olivier Jasmin
Vous reconnaîtrez probablement Philippe-Olivier Jasmin comme un des collaborateurs qui écrit pour le blogue du RMPQ depuis son implantation. Non? Pas de problème! Peut-être comme l’orthothérapeute clinicien aguerri. Celui qui décortique l’anatomie, explore la biomécanique et déniche des tactiques et des approches cliniques efficaces pour ces confrères massothérapeutes? Ou encore, comme le collaborateur pour le blogue de l’AMS et le superviseur-coach d’orthothérapie à leur campus de Montréal? Ou probablement comme celui qui unit des formations de la Chine, de la Colombie-Britannique et des États-Unis à sa formation d’orthothérapeute pour attiser l’étincelle de l’excellence et inspirer ses collègues à être awesome? … … ... Quand il n’est pas en train de masser ou de promouvoir la reconnaissance de la massothérapie par l’éducation, P-O a le nez plongé dans un bouquin, su à exercer sa routine de rame, de callisthénie et de Tai Chi, ou relaxe paisiblement un café à la main. Alors qui est P-O? Un rêveur? Un perfectionniste? Un guerrier pacifiste zen? Pour le découvrir, mets ton casque et viens le rejoindre au front!
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