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Fascinants fascias

4 septembre 2019  |   écrit par Philippe-Olivier Jasmin  |

Ah! Ces fameux fascias. Peu de sujets démontrent une telle polarité. En effet, le terme est devenu un buzzword. Si tu ne les travailles pas, tu lances ton efficacité par la fenêtre. Malheureusement, des conclusions farfelues sont trop fréquemment extrapolées des recherches publiées afin de justifier et supporter des techniques et des approches cliniques. Ce phénomène peut expliquer l’apparition d’un mouvement opposé où, pour plusieurs, entrevoir le mot « fascia » anéantit toute crédibilité.

En présence d’une division aussi extrême, trouver un terrain neutre pour plaire à tout le monde demeure un défi colossal. Aventurons-nous donc en zone démilitarisée, en anatomie. Attachez votre tuque avec de la broche. J’espère que vous aimez les montagnes russes.

Fascinants fascias - blogue du Réseau

Fascias 101

Allez à l’épicerie ou dans votre réfrigérateur et empoignez des poitrines de poulet. Remarquez-vous la pellicule translucide aux allures de saran wrap recouvrant votre viande? Bam! Fascia.

Effectivement, ils consistent en des tissus conjonctifs. Observons-les d’un peu plus près.

  • Les ligaments, tendons, capsules articulaires et aponévroses se classifient comme du tissu conjonctif dense à organisation régulière.
  • Les fascias se catégorisent comme du tissu conjonctif dense à organisation multiétagée.

Bref, la différence se situe surtout dans l’organisation des fibres. Pour citer Myers : « any division is conceptual » (toute division est conceptuelle). Les tendons? La culmination du fascia. Les ligaments et capsules articulaires? Un épaississement du fascia. Le périoste? Une continuité du fascia.

Cependant, puisque l’être humain raffole des classifications, les fascias se subdivisent en deux catégories : superficiels (sous-cutanés) et profonds (musculaires). Si nous, massothérapeutes, démontrons un champ d’action musculaire, notre intervention vise plutôt les fascias profonds. Ceux-ci se divisent à leur tour en deux catégories :

  • Le fascia aponévrotique;
  • Le fascia épimysial.

Le fascia aponévrotique
Notre premier interlocuteur, le fascia aponévrotique, est un fascia communautaire. Cette enveloppe fibreuse recouvre des segments, agglomère ensemble plusieurs muscles, les garde en place et leur sert de tendon mutuel.

Le fascia épimysial
À son tour, notre deuxième intérêt, le fascia épimysial, se veut plus individuel, plus intime. Fusionnée aux muscles, l’étreinte de l’épimysium enveloppe chaque muscle de façon distincte. Par la suite, il s’insinue à l’intérieur du ventre musculaire avec le périmysium qui empoigne plusieurs fibres musculaires. Finalement, l’endomysium s’entrelace ensuite avec chaque myocyte.

Néanmoins, ces subdivisions demeurent le même rouleau de saran wrap qui change de chapeau selon son environnement. Et tous trois sont continus avec le tendon et le fascia aponévrotique.

Maintenant que nous avons couvert ce que tout cours d’anatomie-physiologie 101 révèle, mettez votre casque et creusons.

Les fascias sont passifs! Blogue du Réseau

Les fascias sont un sandwich!

Chaque fascia est constitué de deux à trois couches de collagène superposées. Après tout, ne démontrent-ils pas une organisation multiétagée? Du tissu conjonctif libre sépare chacune de ses couches permettant un glissement à l’intérieur même du fascia et entre le fascia et ses voisins. Bref, un fascia est un sandwich de fibres de collagènes avec quelques fibres élastiques comme garniture.

Attendez deux secondes! Le glissement s’effectue entre deux couches de collagène. Il y a des adhérences? Tout est coulé dans le béton? C’est à l’intérieur des couches multiétagées et entre deux fascias que ça se passe.

Néanmoins, un glissement implique un mouvement.

Les fascias sont passifs!

Comme tout tissu conjonctif, les fascias sont tout aussi passifs que mon chat couché au soleil étalé de tout son long. Seulement, c’est une demi-vérité. Puisqu’ils renferment des myofibroblastes, ils démontrent une capacité contractile. Cependant, cette contraction s’effectue péniblement, s’étale sur une durée ennuyante et, côté intensité, se compare à la contraction de la peau pour refermer une plaie. Cependant, « contraction » n’est peut-être pas le terme approprié, on parle plutôt d’une élévation de la tonicité basale du fascia. Nous sommes à des années-lumière d’une contraction explosive musculaire! L’utilité de cette capacité est quelques fois attribuée à améliorer sa résistance au stress mécanique, ou mieux, à transmettre la force musculaire déployée. Néanmoins, ce phénomène et sa signification demeurent à ce jour sujet à débat.

Il nous manque des morceaux du casse-tête.

Fascias 101 aponévrotique - épimysial - Blogue du Réseau

Les fascias forment des expansions myofasciales

Le tendon ne s’insère pas directement dans l’os. Plutôt, il s’insèrera dans le périoste ou son fibrocartilage. Mais ce n’est pas tout! Chaque muscle s’insère aussi dans le fascia aponévrotique. C’est ce qu’on appelle une expansion myofasciale. Par exemple, le grand pectoral s’attache au bord latéral de la coulisse bicipitale, mais aussi au fascia brachial du biceps. À son tour, le biceps s’insère à la tubérosité bicipitale, mais aussi au fascia antébrachial des fléchisseurs du poignet.

Cette continuité assure trois particularités :

  • Elle stabilise le tendon et réduit le stress subit à son enthèse;
  • Elle transmet la force déployée par un muscle sur une plus grande distance;
  • Elle permet un feedback réciproque entre le muscle et le fascia tout en propageant l’information mécanique d’un muscle à l’autre.

Oh! Je crois que nous sommes tombés sur un petit diamant brut intéressant. Poursuivons.

Les fascias sont anisotropes à la traction!

Les capacités mécaniques du fascia dépendent de la direction de ses fibres. Comme par hasard, les fibres du fascia épimysial sont dans le même sens que les fibres musculaires. Même le fascia aponévrotique, fait comme du plywood, réaligne ses fibres dans la direction de la tension. En effet, le fascia résiste les déformations plus efficacement dans le sens de la longueur que dans le sens transversal. Bref, il se laisse étirer pour s’adapter au changement de volume d’un muscle contracté, mais transmet la force déployée et reçue du muscle en série au tendon, et en parallèle au fascia avoisinant.

Wow. Peut-être y a-t-il un sens dissimulé en dessous de tout ça!

Les fascias sont anisotropes à la traction! Blogue du Réseau

Les fascias présentent une réponse mécanique de contrainte-déformation non linéaire

Le stress mécanique que subit le fascia n’est pas proportionnel avec la tension appliquée. Étrangement, ils répondent un peu comme les phases d’adaptation au stress.

  • Lorsque légèrement stressé d’un point de vue mécanique, le fascia démontre une basse contrainte (il se laisse déformer) pendant que le peu de ses fibres élastiques se laisse étirer.
  • Ensuite, le fascia résistera le stress mécanique en augmentant sa contrainte (il résistera la déformation) proportionnellement à la hausse de stress mécanique subit. C’est ici que le fascia transmettra efficacement la force déployée.
  • Finalement, il y aura une réduction progressive de la contrainte résultant de la fatigue, des dégâts encourus. Bref, le fascia se laisse étirer à nouveau parce qu’il est en train de déchirer.

La beauté de la chose? Cette réponse mécanique est requise pour un comportement plastique!

Les fascias sont viscoélastiques!

Comme le veut l’expression : « les muscles sont élastiques, les fascias, plastiques. » Macroscopiquement, ils réarrangent les cellules de leurs composantes fibreuses internes, modifient leurs propriétés et effectuent une migration des phases liquidiennes à travers le temps. Ce phénomène se présente de plusieurs façons :

  • La contrainte est dépendante à la vitesse où le stress mécanique, la tension, est appliqué. Étirez brusquement le fascia, il déchire; étirez-le doucement, il se déforme;
  • Une charge constante et maintenue augmente la tension subite par le fascia. Pour contrer ce stress mécanique persistant, le fascia se renforcera en déployant davantage de collagène pour nous mener au point suivant;
  • Une tension constante amènera une réduction progressive du stress mécanique enduré par le fascia;
  • Il y a présence d’une hystérèse, c’est-à-dire qu’une quantité d’énergie est perdue dans le cycle chargement-déchargement;
  • Une augmentation de température réduit la viscosité du fascia, qui, à son tour, augmente l’efficacité de sa réponse à l’étirement et au rebond;

Mais P-O, qu’est-ce que tout ça signifie? On ne peut influencer un fascia sans avoir un impact sur un muscle et vice versa. De plus, le muscle demeure l’unité contractile par excellence. Un fascia ne se relâche pas. Il se désadhère ou s’assouplit. Si vous désirez réduire le stress mécanique subit par un fascia, misez plutôt sur l’humeur du muscle qui génère la tension. Après tout, le fascia joue un rôle primordial dans la transmission de la force musculaire. Ça implique aussi que vérifier les agonistes et antagonistes d’un muscle, c’est bien, mais suivre ses expansions myofasciales est un angle mort trop souvent négligé. Et puisque le fascia se modifie plastiquement sur une longue période de temps, le masser à la vitesse de Speedy Gonzalez le désadhère certes efficacement, mais obtiendra un résultat pitoyable côté assouplissement. Ralentissez! De plus, miser sur l’alignement et l’exercice risque d’être plus constructif à long terme.

Bons soins!

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Philippe-Olivier Jasmin

Vous reconnaîtrez probablement Philippe-Olivier Jasmin comme un des collaborateurs qui écrit pour le blogue du RMPQ depuis son implantation. Non? Pas de problème! Peut-être comme l’orthothérapeute clinicien aguerri. Celui qui décortique l’anatomie, explore la biomécanique et déniche des tactiques et des approches cliniques efficaces pour ces confrères massothérapeutes? Ou encore, comme le collaborateur pour le blogue de l’AMS et le superviseur-coach d’orthothérapie à leur campus de Montréal? Ou probablement comme celui qui unit des formations de la Chine, de la Colombie-Britannique et des États-Unis à sa formation d’orthothérapeute pour attiser l’étincelle de l’excellence et inspirer ses collègues à être awesome? … … ... Quand il n’est pas en train de masser ou de promouvoir la reconnaissance de la massothérapie par l’éducation, P-O a le nez plongé dans un bouquin, su à exercer sa routine de rame, de callisthénie et de Tai Chi, ou relaxe paisiblement un café à la main. Alors qui est P-O? Un rêveur? Un perfectionniste? Un guerrier pacifiste zen? Pour le découvrir, mets ton casque et viens le rejoindre au front!

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